Monday, April 14, 2014

Pascal Kané on Brian de Palma (Cahiers, N.277)

This review Note sur le cinéma de Brian de Palma by Pascal Kané is the introduction of de Palma at Cahiers (June 1977). Antoine de Baecque describes its emphasis in terms of genre and presentation of abnormal bodies, “From then one, the youthful American cinema will be understood in terms of working within genres: perverting signs, devouring references, mutating society, it is, fundamentally, a cinema of monsters, a monstrous cinema.” This interest in horror would renew Cahiers’ relationship to American cinema, as de Baecque writes, “Cahiers needed to look at the monsters of American cinema. This necessitated an apprenticeship, and, especially, a total renewing of the cinephilic erudition and critical judgments. Kané is important in this respect and is so Bill Krohn, Cahiers’ new Hollywood correspondent, who wrote at length about Roger Corman early on (Jan. ’79) and would direct the magazine more fully towards the new Horror cinema of this period (Carpenter, Romero, Dante, Cronenberg), which he would compare in terms of renewal and creativity to the French New Wave. Even though Horror cinema would be important at Cahiers it wasn't its only emerging intervention towards American cinema. The magazine also, and perhaps more strongly, featured the New Hollywood directors (Spielberg, Coppola, Cimino, Eastwood) who they would write about at length in their special Made in U.S.A. issues.

Kané’s essay is interesting and brings up many good points in regards to de Palma's early horror films but it's not necessarily important in terms of making de Palma an important Cahiers filmmaker (one of the reasons I'm not translating it; here is the Google translation). It wasn't until Douchet décortique De Palma (N.326) where the previous generation Cahiers critic Jean Douchet confronted his younger peers on why they didn't like de Palma more, when even Godard was a fan. Since then de Palma's reception at Cahiers has been incredibly rapturous in the reviewing of his films, in terms of their engagement with American society and the sophistication of their images, throughout the Eighties, Nineties and the Two-thousands. – D.D.
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Note sur le cinéma de Brian de Palma
Entre le revenant indésirable de Phantom of the paradise, les siamoises secrètes de Sisters et la jeune sorcière de Carrie, il y a un évident point commun. Qu’ils tiennet leur différence d’un accident, d’une malformation ou d’une éducation particulière, les héros de de Palma sont des exclus, isolés par la répulsion qu’ils suscitent tôt ou tard autour d’eux, et qui tient à une sorte d’horreur physique, de dégoût définitive et incontrôlable. Bref, pour leur entourage, se sont des montres.

Voilà certes qui n’est pas neuf dans l’histoire ancienne ou récente d’Hollywood: on assisterait même, on le sait, à un retour en force de la teratologie et du démoniaque; monstres métaphoriques, annonciateurs de disgraces futures, prix à payer pour se racheter (c’est au rachat qu’on verra qu’il y a eu faute). Monstres à brûler, détruire, exorciser, toujours du côté d’un Autre don’t on ne veut rien savoir, sinon qu’ils est ce qui entame l’identiter pleine du groupe. Ces monstres sont doc des symptomes, et leur figurabilité trouve ses ressources dans la seule dimension de l’Imaginaire.

Or, c’est de tout autre chose qu’il s’agit ici. Les monstres de de Palma ne sont pas métaphoriques, ils ne renvoient à aucune menace, à aucun Destin, sinon une fatalité purement individuelle. Personnages explicables, divisés, leur monstruosité n’est dûe en général qu’au hazard. Monstruosité arbitraire, non symptomatique et donc non demonstrative, qui n’exhibe aucune difformité apparent (le phantom est masque, les siamoises « incognito », etc.).  Cette monstruosité-là ne se joue pas dans la dimension de l’Imaginaire (qui est toujours la dimension de la segregation et de l’exclusion), même si ce sont précisément ces themes que le cinéma de de Plama, en ce qu’il a de plus intéressant, se propose d’aborder.

C’est évidemment à Browning que l’on pense, avec le-quel de Palma entretient certainement le plus de rapports (alors que la reference à Hitchcock est plutôt superficielle), puisque là aussi, la representation de la monstruosité déjoue le réflexe humaniste « ce sont des hommes, après tout  », avec ce qu’il implique d’apparente uniformisation. C’est dabbord qu’il ne s’agit pas d’une infra-humanité mais d’individus, au contraire, supérieurs (compositeur surdoué, surpouvoir de Carrie…), aux sentiments d’une extreme profondeur, et qui se refusent à admettre la semi-inclusion apitoyée don’t ils font l’objet. Et c’est justement au moment où l’on pourrait convener sans trop de gene de leurs tares, puisqu’en conviennent dans les films certain personnages qui cherchent à les excuser (prof de gymnastique faisant ressortir la folie mystique de la mere de Carrie, journaliste gauchiste à bonnes intentions, milieu compatissant du veuf d’Obsession…) qu’ils font la preuve, tout à la fois de leur refus et de leur altérité.

Echappant donc doublement au moment où ils semblaient assimilables: refus d’être confondus avec la moyenne des Américains, réduits à la norme, et refus d’être récupérés par le groupe don’t ils vont alors se séparer radicalement par un acte don’t la violence ou l’asocialité laissera pantois les bonnes intentions humanisantes. Ainsi, l’affirmation de la monstruosité chez de Palma apparait comme un désir d’échapper à la norme, qui, souterrainment, produit cette monstruosité (c’est la famille qui est monstrueuse dans Obsession, le climat universitaire dans Carrie…).

Cette abjection de la norme prend, dans tous les films, le même aspect, celui d’une segregation sexuelle imposée aux personnages. Le sexe, instance suprême de normalization, est ce qui decide de l’inclusion ou de l’exclusion hors du groupe. Et c’est la mise hors-sexe des monstres qui va déclencher le drame: ce qui se produit selon un double movement très systématique: 1) désir de la norme chez les monstres, qui est toujours celui d’être reconnu sexuellement par un partenaire normé, 2) I’mpossibilité d’arriver à cette reconnaissance, soit que le partenaire se dérobe (Phantoms) ou disparaisse (Obsession), soit que le milieu y résiste (Carrie), soit, plus profondément qu’une partie d’eux-mêmes s’y refuse (Sisters). Ce qui est en jeu dans cette interrogation de ce qui sous-tend l’idée meme de norme, c’est le role que joue la function imaginaire: la reconnaissance du corps de l’autre dans sa fondamentale identité à soi. C’est à partir de cette identité que se construit le désir normé, en refoulant donc la réalité biologique (règles montrées de Carrie, malformation de la siamoise, brulûre du phantom) qui est tellement insupportable dans ces films: corps inévitables et d’autant plus inquiétants que leur étrangeé n’est pas visible. Il y a chez de Palma une fascination du corps, du corps physiologique don’t il veut découvrir, bien au-delà de la nudité, tous les secrets (à l’opposé donc de la découverte de la castration maternelle). C’est l’intérieur meme du corps que voudrait découvrir le cinéma de de Palma, ce qu’il y a sous la peau. D’où cette omniprésence du sang dans ses films (ce sang qui recouvre le corps de Carrie, créant l’illusion d’une chair à vif, comme est à vif la chair du phantom brûlé) et don’t le sang menstrual – frappé d’interdit au cinéma – est certainment la forme la plus intrigante.

La monstruosité n’est un cas particulier dans le cinéma de de Palma que dans la mesure où tout corps semble pour lui un cas particulier, où son intérêt ne va pas vers ce qui est commun, mais vers ce qui diffère d’un corps à un autre. Il est d’ailleurs caractéristique qu’une société comme la société américaine qui ne cesse de se referrer à l’individu comme pierre de touché de tout son système de valeurs, ne supporte au fond le sujet que s’il est interchangeable, et est saisie d’un veritable movement d’horreur devant out ce qui lui apparaît comme non-conforme à son modèle. Le sujet ne peut être qu’un représentant abstrait d’une majorité (c’est le sujet de la statistique).

Il y a dans le cinéma de de Palma une analyse du racism inevitable secrete par toute société qui fonctionne à la norme. Mais il ya aussi une critique de l’anti-racisme humaniste, celui qui refoule l’idée de difference. Car ce qui pousse de Palma à aller plus loin, c’est justement une passion pour la difference: c’est en cela qu’il écarte de la journaiste gauchiste de Sisters (l’un des personnages les plus fouillés de son cinéma) qui, elle, s’arrête là, à la denunciation du racism de la police, et ne veut pas s’avancer plus, sur ce chemin d’une difference qui n’est plus prise en charge par du discours, par de la doxa (example: « le droit à la différence »).

D’où que les films de de Palma montrent toujours deux types d’amour pour les monstres: au-delà d’une solicitude humaniste, bien-pensante, celle de la profeseur de Carrie, de la journaliste gauchiste, etc. qui vise toujours à rabattre l’individu sur la norme, existent des passions violentes, impossibles, mortelles (la mere de Carrie, le chirurgien de Sisters). Amours véritables et fous, destinés à l’échec en ce qu’ils ne visent qu’à preserver leur objet du pire: le retour à la norme, à la reconnaissance, à l’indifférence.

Pascal Kané

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